Qu’en est-il du travail aujourd’hui ? Dans quelle mesure et pour quelles raisons le salariat apparaît-il plus que jamais comme l’horizon social indépassable de notre époque malgré l’évidence d’un chômage résiduel de masse ? Pourquoi la norme du plein emploi sur laquelle syndicats, partis politiques, mais également une grande majorité de salariés s’obstinent à s’aligner en arrive-t-elle à occulter tout débat philosophique, politique et social sur la place et la signification du travail dans la vie de chacun ?

Sous le double coup de la gestion du chômage et des avancées des idéologies néo-libérales prônant la flexibilité et substituant au droit au travail un devoir d’employabilité précarisant des pans entiers de la population, les réflexions relatives à la mise en question du modèle salarial se distinguent surtout par leur inactualité brûlante. Pourtant, l’économie produit de plus en plus de richesses avec de moins en moins de travail. Mais cette situation ne semble pourtant pas en mesure de remettre en cause la norme travail à laquelle la grande majorité continue de se référer.

C’est à ces interrogations que nous consacrons une partie de ce numéro à travers un entretien avec Alain Caillé et un article de Yovan Gilles, considérations inactuelles s’ils en étaient, mais dont nous pensons qu’elles risquent ces prochaines années de constituer l’ordre du jour incontournable des sociétés industrielles avancées.